Tiphaine Raffier tend un miroir à ses contemporains, avec pour matière première les œuvres de miséricorde de la Bible. Donner à boire aux assoiffés, accueillir les étrangers, vêtir ceux qui sont nus… Elle a sélectionné neuf histoires qui posent aux protagonistes un dilemme moral. Les situations banales glissent peu à peu vers des interrogations fondamentales. Jusqu’où peut-on faire preuve d’empathie ?
Jeudi 8 décembre 2022 — 18h10
Vendredi 9 décembre 2022 — 18h10
Réservation conseillée et possible jusqu’à la veille du spectacle par téléphone au 09 800 840 40
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Entre le juste et l’injuste, le choix n’est pas toujours si évident. D’abord, qu’est-ce qui est juste ? Injuste ? Avant de répondre, Tiphaine Raffier pose la question. La morale n’est pas ici une injonction, l’engagement vers le bien n’a rien d’abstrait, ce sont des corps qui agissent, des gestes. La question du choix est simple ou complexe mais soulager le corps ou l’esprit de son prochain requiert des actes. La scénographie évoque la Chapelle Pio Monte delle Misericordi, à Naples, dans laquelle une peinture du Caravage décrit Sept œuvres de miséricorde. Des colonnades, des traces anciennes en partie recouvertes… Sur scène, un ensemble de musique classique, un fond de scène vidéo, une caméra qui sonde les cœurs. Neuf tableaux, différents personnages, plus ou moins aimables, plus ou moins détestables, des dilemmes moraux contemporains à résoudre, mais c’est finalement à nous que ces questions se posent. Que ferions-nous, nous, dans ces situations ?
Texte et mise en scène Tiphaine Raffier
Assistanat et dramaturgie Lucas Samain
Scénographie Hélène Jourdan
Lumières Kelig Le Bars
Vidéo Pierre Martin Oriol
Musique Othman Louati
Son Frédéric Peugeot et Hugo Hamman
Costumes Caroline Tavernier assistée de Salomé Vandendriessche
Chorégraphies Pep Garrigues et Salvatore Cataldo
Avec Sharif Andoura, Salvatore Cataldo, Éric Challier, Teddy Chawa, François Godart, Camille Lucas, Édith Mérieau, Judith Morisseau, Catherine Morlot et Adrien Rouyard
Et les musiciens de Miroirs Étendus Guy-Loup Boisneau, Émile Carlioz, Amélie Potier et Romain Louveau
Régie générale Olivier Floury
Régie plateau Manuel Bertrand
Régie lumières Christophe Fougou
Régie son Hugo Hamman et Martin Hennart
Régie vidéo Pierre Hubert
Cadreur Raphaël Oriol
Montage de production Sabrina Fuchs
Administration et production Véronique Atlan Fabre, Juliette Chambaud et Charlotte Pesle Beal
Production La femme coupée en deux et La Criée, Théâtre National de Marseille
Coproduction Châteauvallon-Liberté, scène nationale / ExtraPôle Provence-Alpes-Côte d’Azur* / Odéon-Théâtre de l’Europe / Festival d’Avignon / Théâtre du Nord – CDN Lille-Tourcoing / Théâtre de Lorient – CDN / Théâtre Gérard Philipe – CDN de Saint-Denis / Théâtre National Populaire de Villeurbanne, Théâtre Olympia – CDN de Tours / La Rose des vents – SN Lille Métropole Villeneuve d’Ascq / Le Quartz – Scène nationale de Brest / Le Phénix – Scène nationale de Valenciennes-Pôle européen de création / Scène nationale 61 / Le Préau – CDN de Vire-Normandie
*Plateforme de production soutenue par la Région SUD Provence-Alpes-Côte d’Azur rassemblant le Festival d’Avignon, le Festival de Marseille, le Théâtre National de Nice, le Théâtre National de la Criée, Les Théâtres, Anthéa, Châteauvallon-Liberté, scène nationale et la Friche la Belle de Mai
Avec le soutien de la DRAC Hauts-de-France, de la Région Hauts-de-France, de la Ville de Lille, de la DGCA et du Grand Sud-Lille.
Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National et le dispositif d’insertion de l’École du Nord – soutenu par la Région Hauts-de-France et le Ministère de la Culture
La compagnie La femme coupée en deux bénéficie du soutien du ministère de la Culture / Direction régionale des affaires culturelles Hauts-de-France, au titre de l’aide aux compagnies conventionnées.
Photos © Simon Gosselin
Texte © François Rodinson
C’est là, et bien là, le tour de force de Tiphaine Raffier. Naviguer constamment, et avec la même exigence, entre la métaphysique, le religieux, l’éthique, la morale, la philosophie et le réel. Prendre tout ensemble et le mettre à hauteur d’Hommes pour leur tendre un miroir. Vincent Bouquet — Sceneweb
L’œuvre est une traversée exceptionnelle au cœur de notre humanité, magistralement maîtrisée, riche de questionnements qui se diffractent et nous touchent. Agnès Santi — La Terrasse
Tiphaine Raffier, votre spectacle a pour titre La réponse des Hommes. Quelle est donc cette question qui leur est posée, aux Hommes ?
Tiphaine Raffier — Des questions morales sont posées en passant par les œuvres de miséricorde dûment répertoriées par Saint Matthieu dans Le Nouveau Testament. Par exemple, à partir de «assister les malades », deux questions se posent : «c’est quoi l’assistance ?» et «c’est quoi un malade ? ». Ces deux questions me suggèrent une fiction, des personnages entraînés dans des histoires, confrontés à des choix, des situations à partir desquelles j’écris le texte du spectacle. Je compose des scènes, des tableaux de durée variable, de cinq à quarante minutes où ces questions sont posées de différents points de vue. Le spectateur, en face, est lui-même très actif, il se pose lui aussi nécessairement des questions. J’essaie de provoquer un cheminement. Je dessine la carte de ce cheminement mais, dans ce cadre, le spectateur est libre. Cela dit, je ne cherche pas à perdre les gens. On sait très bien qui est le frère de qui et autres données anecdotiques, c’est clairement établi de manière à laisser le champ libre aux grandes questions morales, fondamentales, intéressantes, puissantes. Il faut donc que le chemin soit bien tracé.
Peut-on parler d’une esthétique de l’éthique ?
T. R. — L’esthétique est plurielle. Sur le plateau, il y a un ensemble de musique classique, un danseur, un vidéaste et dix acteurs. J’aime le plaisir du spectacle. Si ce plaisir est au service de ce que l’on raconte, évidemment. Il n’y a rien de gratuit. Si l’on décide d’utiliser l’image, c’est qu’entre le moment où la caméra s’allume et celui où la caméra s’éteint il y a une question morale posée que l’on formule mieux avec la caméra, avec l’usage d’un gros plan par exemple. C’est que cette technique, à ce moment précis, est une nécessité. On peut donc dire qu’il y a non seulement une esthétique de l’éthique mais également une éthique de l’esthétique !
Quel est le rôle de la musique dans le spectacle ?
T. R. — Ça dépend des œuvres. Parfois, c’est un levier émotionnel très simple. On a besoin de l’émotion pour penser les choses dans leur complexité. Ce ne peut pas être que de la théorie, ça passe par le corps aussi. Le corps des spectateurs autant que le corps des acteurs. On va également essayer de poser la question du lien entre la morale et la musique. Question un peu folle, certes. Mais en quoi la musique peut-elle nous déranger quand elle va dans des disharmonies ? En quoi peut-elle aussi nous endormir ou nous rassurer, voire nous emprisonner dans l’harmonie? Nous posons la question de la morale dans l’art sans être figuratifs.
Propos recueillis en 2020 par François Rodinson
Initialement formée à l’ENMAD de Noisiel (Val-de-Marne), Tiphaine Raffier intègre la 2e promotion de L’École du Nord en 2006. Elle y travaille sous la direction de Stuart Seide (notamment dans Quel est l’enfoiré qui a commencé le premier ? de Dejan Dukovski). En 2010-2011, elle travaille avec Bruno Buffoli et Laurent Hatat, puis au Théâtre du Prato avec Gilles Defacque, notamment dans Soirée de Gala (2013- 2014). On la retrouve dans les créations de Julien Gosselin et du collectif Si vous pouviez lécher mon coeur : Gênes 01 de Fausto Paravidino (2010), Tristesse animal noir d’Anja Hilling (2011), Les Particules élémentaires d’après Michel Houellebecq (2013), 2666 d’après Roberto Bolaño (2016). Et également dans L’Adolescent, d’après Dostoïevski, mis en scène par Frank Castorf (Cologne, 2019). En 2020 elle intègre la distribution de Les serpents mis en scène par Jacques Vincey.
Tiphaine Raffier commence le texte et la mise en scène en avril 2012 suite à une proposition du Théâtre du Nord. Elle écrit, met en scène et joue sa première pièce La Chanson. Le spectacle est crée lors du 1er Festival Prémices à Lille. En 2014, dans le cadre de la troisième édition du même festival, elle monte sa deuxième pièce Dans le nom. En 2017, c’est le spectacle France-fantôme qui verra le jour. La même année elle réalise un moyen-métrage issu de sa première pièce de théâtre, La Chanson. Ce projet a été présenté en mai 2018 à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. Sélectionné dans une trentaine de festivals, il a remporté de nombreuses distinctions. En 2020 Tiphaine Raffier créé La Réponse des Hommes, dont la première tournée est reportée à la saison 21-22 en raison de la pandémie. Elle travaille également à l’adaptation en long métrage de sa pièce Dans le nom.