L'Assignation 1280
Théâtre - Conférence

L’Assignation

Tania de Montaigne — Stéphane Foenkinos

« J’essaie de me souvenir du temps où je n’étais pas Noire, mais seulement noire, sans majuscule. Ce temps où noire était un adjectif, pas un nom : une simple couleur. » Dans cette conférence-spectacle mise en scène par Stéphane Foenkinos, Tania de Montaigne adapte son roman éponyme sorti en 2018.

L'Assignation 1
L'Assignation 2
Lieu
  • Le Liberté
  • Salle Albert Camus
Accessibilité
  • Pour toutes et tous
    • dès 15 ans
  • Dates Durée estimée 1h20
  • mercredi 20 décembre 2023 20:00
  • jeudi 21 décembre 2023 20:00
Tarifs
  • Plein tarif 30 €
  • Tarif adulte avec la carte Châteauvallon-Liberté 20 €
  • Tarif partenaire (CSE et Associations culturelles partenaires) 20 €
  • Tarif - 30 ans 15 €
  • Tarif - 18 ans 10 €
  • Tarif solidaire 5 €

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Informations pratiques

Un essai plein d’humour dans lequel Tania de Montaigne interroge sur notre racisme ordinaire et nos préjugés. Comment, à une époque où chacun cultive sa différence, nous accolons toutes et tous, consciemment ou non, une étiquette sur les gens que nous côtoyons en fonction de leur couleur de peau, de leur religion ou de leur orientation sexuelle? Revendiquant le fait de pouvoir dire simplement «noir», « jaune», « juif » sans à priori – quoiqu’en pensent les identitaires de tout poil – elle embarque le public dans une expérience collective et l’invite à inventer quelque chose de nouveau.

Texte Tania de Montaigne
Adaptation Tania de Montaigne et Stéphane Foenkinos
Mise en scène Stéphane Foenkinos
Avec Tania de Montaigne
Collaboration artistique Aymen Bouchou ou Anis Hedjem, Clara Choi et Florence Maury
Assistanat à la mise en scène Pierre X. Garnier
Lumières Claire Choffel-Picelli
Scénographie Laurence Fontaine
Superviseur visuel Pierre-Alain Giraud
Son Lucile Demars

 

Production Arnaud Bertrand 984 Productions
Coproduction Tnb Rennes
Coréalisation Théâtre du Rond-Point

 

Photos © Vincent Berenger, Châteauvallon-Liberté, scène nationale (couverture) et © Giovanni Cittadini Cesi (images 1 et 2)
Texte © Vanessa Asse

En octobre 2020, un professeur a été assassiné pour avoir défendu la liberté d’expression. Hormis l’effroi, quelle réponse apporter en tant que citoyen ? Quelles sont nos armes de saltimbanque face à cela, à part la démagogie, les déclarations d’intention, les manifestations ou autres signatures de pétition ?

Il a fallu prendre du recul, se souvenir de pourquoi je continuais à faire ce métier. En relisant l’essai de Tania de Montaigne, l’Assignation, les Noirs n’existent pas un premier éclairage m’est apparu. Elle y met à jour les écueils d’un monde entièrement basé sur des idées reçues ancestrales et rassurantes qui nous permettent de vivre notre quotidien en oubliant l’absurdité de leur énoncé… Un monde de Majuscules ou le droit à l’individualité, au particularisme est nié.

En réponse tardive et désordonnée à ces préjugés, un pendant bien-pensant popularisé aux Etats-Unis fustige toute stigmatisation du « groupe » en s’offensant de ceux qui osent parler de ce qu’ils ne connaissent pas. Bienvenue aux pourfendeurs de l’appropriation culturelle qui estiment qu’on ne peut pas cuisiner des sushis si on est un chef cuisinier mexicain ou enseigner le yoga si on n’est pas né à Trivandrum.

L’envie de confronter alors un public à ces deux courants en utilisant l’adresse directe et le théâtre immersif s’est imposée. Une réponse à la fois ludique et sociétale avec de l’humour, toujours de l’humour, car le sourire dans une salle comme dans la vie est notre seule réplique et notre seule ambition pour faire évoluer les regards, même le temps d’une soirée.

Stéphane Foenkinos

C’est pertinent sans jamais être démonstratif, c’est une prouesse de faire de ce sujet quelque chose de léger et de drôle. Charlie Hebdo

Pédagogique et pétillant. Le Monde

Claire Chazal — Votre pièce Noire, la vie méconnue de Claudette Calvin, sur la ségrégation raciale aux États-Unis dans les années 1950, devient une installation immersive (déjà présentée à Beaubourg). En quoi s’insère-t-elle dans le thème de la croyance ?

Tania de Montaigne — D’abord parce que l’histoire que j’ai voulu raconter lutte contre les préjugés racistes… Elle montre comment une très jeune fille noire, qui refuse de laisser sa place à un blanc dans le bus, mène un combat contre l’idée répandue dans un État comme l’Alabama, que les blancs et les noirs ne sont pas égaux. Elle fait changer les mentalités comme le fera 9 mois plus tard Rosa Parks.

Claire Chazal — Mais en quoi cette réalité augmentée, mise au point par Stéphane Foenkinos et Pierre-Alain Giraud accentue-t-elle la prise de conscience ?

Tania de Montaigne — Parce que l’innovation technologique va permettre à des petits groupes (de 10 personnes), de recréer le principe d’un collectif immergé dans une réalité. Chacun participe à l’action, pénètre dans la lutte, y croit vraiment. Il n’y a plus la distance de la scène. Personne ne peut dire : je n’étais pas là, je ne suis pas américain.

Claire Chazal — Et c’est un message politique plus fort ?

Tania de Montaigne — Ce n’est pas un tract, je ne veux pas donner de leçon, chacun est libre. Mais les personnages ne sont plus incarnés, ils deviennent réels ! Y croire, pour ne plus reproduire sans être pris en otage…

Claire Chazal — Dans L’Assignation, sorte de conférence spectacle (tirée d’un roman paru en 2018), vous vous en prenez, avec humour parfois, à l’idéologie identitaire. Là aussi vous nous faites réfléchir sur ce que croit la société.

Tania de Montaigne — Dans ce texte, nous avançons ensemble. Ce n’est pas solennel, je ne prétends pas détenir la vérité, je ne suis pas la seule à réfléchir.

Claire Chazal — Vous dites : « Je me souviens du temps où je n’étais pas Noire mais noire ». Cela veut dire que vous vous opposez et refusez les nouvelles croyances (qui nous viennent souvent des États-Unis) selon lesquelles chacun se réfère forcément à une communauté.

Tania de Montaigne — J’aime qu’il y ait des déplacements permanents, des contradictions… Cela permet de passer d’évidences pures, de croyances donc, à des réalités différentes. Ce qui paraît indiscutable devient plus nuancé…

Claire Chazal — Et donc cela permet de combattre les préjugés et beaucoup de fausses croyances.

Tania de Montaigne — Oui cela me paraît très important parce que certains préjugés peuvent avoir des conséquences anodines. Mais d’autres peuvent entraîner le pire, la radicalité, le fascisme… Croire peut apporter de l’espoir et donner un sens à sa vie. Mais cela peut aussi déboucher sur un communautarisme dangereux, voire au totalitarisme !

Entretien réalisé en juillet 2023 par Claire Chazal,
Journaliste et présidente du Liberté, scène nationale

Tania de Montaigne

Tania de Montaigne est écrivaine. Elle est l’auteure de romans et d’essais dont Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin (éditions Grasset) prix Simone Veil 2015. Son dernier essai L’Assignation, les Noirs n’existent pas (éditions Grasset) a reçu le Prix de la laïcité 2018. Depuis 2019 Tania de Montaigne évolue sur scène sous la direction de Stéphane Foenkinos. Elle est artiste associée au Théâtre National de Bretagne. En parallèle de l’écriture littéraire, Tania de Montaigne compose, chante et intervient régulièrement en atelier scolaire, social et carcéral. Elle est un des membres fondateurs du Collège Citoyen de France.

Stéphane Foenkinos

Stéphane Foenkinos est réalisateur, metteur en scène, auteur et directeur de casting.

Depuis 1997, il a collaboré à une soixantaine de longs métrages avec entre autres, Jean-Luc Godard, Jacques Doillon, François Ozon, André Techiné, Claude Chabrol, Coline Serreau, Valérie Lemercier, Danièle Thompson, Catherine Corsini, Peter Greenaway, Robert Zemeckis, Terrence Malick, Woody Allen et les franchises Harry Potter et James Bond.

Encouragés par Jacques Doillon à travailler ensemble, les frères Foenkinos écrivent et réalisent le court métrage Une histoire de pieds (2005), primé à de nombreuses reprises. En 2011, ils adaptent le roman à succès de son frère, La Délicatesse, pour le long métrage éponyme avec Audrey Tautou et François Damiens. Le film est nommé deux fois aux Césars et sort dans plus de 35 pays.

En 2017, ils sortent Jalouse, avec Karin Viard dans le rôle-titre qui vaudra à l’actrice le Globe de Cristal de la meilleure actrice. Ils retrouvent l’actrice en 2021 dans Les Fantasmes où elle est entourée de Jean-Paul Rouve, Monica Bellucci, Carole Bouquet, Denis Podalydès ou encore Ramzy Bedia. Outre son travail avec Tania de Montaigne, il a écrit des sketches pour Sylvie Joly et Thomas Poitevin (Thomas et ses Perruques) et a collaboré pour la scène avec Alex Beaupain et Arthur Nauzyciel.