Charles Berling a choisi de mettre en scène deux huis clos aux dialogues rigoureux et aux non-dits implacables de l’un des plus grands dramaturges du XXe siècle, le suédois Lars Norén. Disparu en 2021, il laisse derrière lui plus de 100 pièces, qui ont souvent provoqué discussions et débats mais qui restent toujours appréciées de la critique et du public. Auteur de grandes fresques humaines, Lars Norén porte un regard lucide sans concession sur la violence à la fois intime et sociétale du monde d’aujourd’hui.
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Le bar est ouvert les jours de représentation, 1h avant le début du spectacle et après la représentation. Il propose une restauration légère, avec des produits locaux et de saison.
Pour Erik et Marie, le dimanche est jour d’ennui. Dans leur salon, nous sommes témoins des vifs échanges et des silences de ce couple à bout de souffle. Les joutes verbales, toujours à deux, en tête-à-tête, se démultiplient à l’arrivée de leurs deux enfants, Peter, 16 ans et Anna, 19 ans. Ces derniers vont tout faire pour échapper à ce cocon mortifère.
Dans cette pièce de Norén, les répliques font mouche et laissent affleurer peu à peu l’ombre tout en nous faisant sourire et même rire. Face à ces éclats intimes, nous nous retrouvons au cœur des névroses de cette famille.
Texte Lars Norén
Traduction Amélie Wendling et Johan Härnsten
Adaptation Amélie Wendling et Alain Fromager
Mise en scène Charles Berling
Scénographie Charles Berling et Marco Giusti
Costumes Bernadette Villard
Collaboration artistique Christiane Cohendy et Amélie Wendling
Avec Charles Berling en alternance avec Alain Fromager et Caroline Proust en alternance avec Bérengère Warluzel + une comédienne et un comédien dans le rôle des adolescents (distribution en cours)
Production Châteauvallon-Liberté, scène nationale
Coproduction Théâtre National de Nice –TNN
Création le 5 mars 2025 pour C’est si simple l’amour et le 6 mars 2025 pour Lost & Found au Liberté, scène nationale.
Photos © Vincent Berenger — Châteauvallon-Liberté, scène nationale
Texte © Amélie Wendling
Dimanche, dans un salon qui ne dit pas son nom, Erik et Marie prennent la mesure de l’ennui lié à ce jour de la semaine. Leur couple coule vers la suite des années de vie commune et l’interroge. De sous-entendus acides en confrontations directes, ils nous rendent témoins d’un modèle bourgeois insolemment sûr de ses fondations, de ses acquis, de ses modes d’emploi. Puis entrent Peter, leur fils de 16 ans et Anne leur fille de 19 ans. En quelques échanges que Lars Norén sait rendre irrésistiblement drôle-amers, le cadre explose et la position des parents passe du vacillement à la chute. Anne la fille, est dépressive et toxicomane, Peter le fils, épouse les idées de la droite radicale et passe son temps sur des sites pornographiques. La violence des rapports n’a d’égal que les élans désespérés des parents arrivés au bout de leurs tentatives.
Cette pièce de Lars Norén a une grande puissance comique tant les échanges percutants entre les protagonistes suscitent un malaise que le spectateur ne peut évacuer que par le rire. Ces vies qui s’affichent font resurgir les souvenirs de nos propres expériences familiales, soulèvent ce qui nous constitue : des instants parfois si violents qu’ils nous paraissent irréels. La scénographie sera le miroir de l’abstraction qui caractérise cette relation parents-adolescents. Des meubles surdimensionnés, en apesanteur pour certains, une absence de frontière entre l’intérieur et l’extérieur, entre la salle et le plateau. Et une toile, un ciel lourd, orageux, une chape.
Au cœur de ces deux pièces se trouvent des couples à bout de souffle, avec ou sans enfant. Certains prénoms se font écho. Lost and Found et C’est si simple l’amour font partie du cycle des quatorze Pièces de mort écrites par Lars Norén entre 1989 et 1995. Toutes ces pièces parlent d’une certaine manière du temps et de la mort. Elles forment une fresque de fragments. Comme un Parthénon. Norén voulait écrire ce qui surgissait, sans se censurer, sans aller jusqu’à la fin de la scène. Il écrivait plusieurs pièces en même temps. Les mêmes personnages peuvent donc exister dans différents textes mais pas au même moment de leur vie. Dans ces deux pièces, on retrouve quelques-uns des thèmes récurrents de l’écriture de Lars Norén : le couple bourgeois et ses déchirements, la difficulté d’avoir ou de vivre avec un enfant, les ravages des névroses parentales. Deux partitions exigeantes pour des virtuoses du jeu.
Né à Stockholm en 1944, Lars Norén grandit dans le sud de la Suède où ses parents dirigent un hôtel restaurant. Lars Norén est l’auteur de plus de cent pièces de théâtre. Ses pièces, appréciées du public et souvent de la critique, ont régulièrement provoqué débats et discussions. Sa productivité et sa recherche constante de nouvelles formes de langage et de représentation caractérisent son écriture. Norén fut d’abord poète pendant 20 ans. En 1963 est publié Lilas, neige, son premier recueil de poèmes, d’inspiration surréaliste. Dans les années 1970, il publie deux romans qui se déroulent dans un Stockholm contemporain peuplé de loosers, de prostituées, de criminels et de drogués.
À partir de la fin des années 1970, Lars Norén se consacre au théâtre. Il connaît un succès immédiat en 1980 avec Oreste et Le Courage de tuer. Sa percée se confirme avec ses « pièces d’hôtel », autobiographiques, La nuit est Mère du jour et Le Chaos est voisin de Dieu (1982-1983). Puis ses textes réalistes abordent des drames familiaux et relationnels dans des milieux aisés mais émotionnellement fragiles (Démons, Sourire des mondes souterrains, La Veillée). Avec ses pièces mettant en scène des quartets bourgeois dans un huis clos (Automne et Hiver, Bobby Fisher vit à Pasadena etc.), il atteint un public plus large.
De 1989 à 1995, il écrit quatorze pièces appelées De döda pjäserna (Les pièces de mort) dans lesquelles il explore le monde capitaliste de ces années-là et l’image collective que nous avons de nous-mêmes, particulièrement celle résultant de circonstances extérieures comme l’effondrement de l’État Providence. Parmi ces pièces on retrouve C’est si simple l’amour, Les Feuilles tombent sur Vallombrosa, Kliniken, Lost and found et Sang.
En 1998, avec Catégorie 3:1, Norén quitte le cercle étroit de la famille pour revenir dans les rues de Stockholm où se trouvent les plus démunis, les exclus, les marginaux, tous ceux qui n’ont plus de voix dans la société contemporaine suédoise. Le théâtre de Norén devient social et sociétal, il s’intéresse aux espaces et donne la parole à ceux que la société a exclus : prisonniers, SDF, malades mentaux, réfugiés, victimes de torture… Ses œuvres les plus récentes évoquent les rencontres et le temps dans l’espace humain. Le ton est devenu plus existentialiste. Norén évoque les débuts et les fins, le temps qui passe, les au-revoir, la mort.
En parallèle, il publie en 2008 son journal de travail (1680 pages) sous le titre Journal d’un dramaturge 2000-2005. Suivront quatre autres tomes. En 2018, il entre au répertoire de la Comédie Française en créant Poussière.
Lars Norén a également été le directeur artistique du Riksdrama au Riksteatern (Théâtre National Itinérant suédois) de 1999 à 2007, et celui du Folksteatern de Göteborg de 2009 à 2011. Il est emporté par la Covid-19 en janvier 2021.
Charles Berling découvre le théâtre à quinze ans en jouant au sein de l’atelier théâtre, créé par son frère aîné, Philippe Berling, au lycée Dumont-d’Urville de Toulon. Après son baccalauréat, il suit une formation de comédien à l’INSAS à Bruxelles puis intègre la Compagnie des Mirabelles et le théâtre national de Strasbourg dirigé par Jean-Louis Martinelli. En parallèle à une carrière théâtrale, aux côtés des plus grands metteurs en scène (Moshe Leiser, Jean-Pierre Vincent, Bernard Sobel, Claude Régy, Alain Françon, Jean-Louis Martinelli, Ivo van Hove etc…), Charles Berling se fait connaître du grand public par le film Nelly et Monsieur Arnaud de Claude Sautet et surtout, en 1996, Ridicule de Patrice Leconte. Il alterne films populaires (Père et Fils, 15 août, Le Prénom, Trois jours et une vie…) et d’auteur (L’Ennui, L’Heure d’été…). Ce comédien revendiquant sa liberté s’investit dans des aventures collectives qui lui donnent l’opportunité de prendre des responsabilités dépassant celle du jeu. Avec plus de cinquante rôles au théâtre, tout autant au cinéma, et plusieurs mises en scène, sa curiosité et ses désirs éclectiques ne tarissent pas et l’amènent sur le terrain de l’écriture (son premier roman, édité en 2011, empruntant son titre à Camus, Aujourd’hui, maman est morte, reçoit le prix Jean-Jacques Rousseau ; Un homme sans identité est lui édité en 2018) et sur celui de la chanson avec son album Jeune Chanteur, en 2012, dont il écrit la totalité des textes et à l’occasion duquel il se produit sur scène.
Il aborde la mise en scène dans les années 1990 et monte Dreck de Robert Schneider en 1997, puis Caligula d’Albert Camus, Fin de Partie de Samuel Beckett, Gould Menuhin spectacle théâtral et musical, Calek en 2014. En 2015, Charles Berling est à l’affiche de Vu du pont d’Arthur Miller, mis en scène par Ivo van Hove à l’Odéon – Théâtre de l’Europe, un rôle pour lequel il obtient le Molière du comédien dans un spectacle de théâtre public. Il a joué dans la reprise d’ART de Yasmina Reza, au Théâtre Antoine à Paris et en tournée partout en France en 2018-2019. Après la mise en scène et l’interprétation principale de la pièce de Bernard-Marie Koltès, Dans la solitude des champs de coton en 2016, il a conçu et mis en scène une adaptation du film de Jean-Luc Godard, Vivre sa vie en 2019.
En 2010, la ville de Toulon confie à Charles et Philippe Berling la direction du Théâtre Liberté qui ouvrira ses portes au public en 2011. En 2015, le Liberté, alors co-dirigé par Charles Berling et Pascale Boeglin-Rodier, et Châteauvallon dirigé par Christian Tamet, obtiennent ensemble le label Scène nationale, sous le nom de Châteauvallon-Liberté, scène nationale. En 2018, ces deux institutions culturelles majeures de l’agglomération toulonnaise sont réunies par une même direction, assurée depuis 2020 par Charles Berling seul, tout en poursuivant son activité artistique.
Au théâtre, il joue dans l’une des dernières créations de Pascal Rambert Deux amis (première le 9 juillet 2021 au Festival d’été de Châteauvallon). Il a créé avec Bérengère Warluzel au Festival OFF d’Avignon 2021 Fragments d’après des textes d’Hannah Arendt. Il tourne dans toute la France avec Les Parents terribles, d’après Jean Cocteau dans une mise en scène de Christophe Perton, aux côtés de Muriel Mayette-Holtz, Marie de Medeiros, Émile Berling et Lola Créton. Il a tourné pour la télévision dans l’adaptation de L’Île aux trente cercueils de Maurice Leblanc et partage l’affiche avec Isabelle Adjani et Pierre Niney dans Mascarade réalisé par Nicolas Bedos et présenté hors-compétition au Festival de Cannes 2022. En 2023, il tourne pour France Télévision le téléfilm L’Enchanteur, réalisé par Philippe Lefebvre, et présenté en compétition lors du dernier Festival de la Fiction de La Rochelle. Il adapte au théâtre avec Philippe Collin et Violaine Ballet le podcast à succès de France Inter : Léon Blum, une vie héroïque. Cet évènement théâtral participatif a été présenté pour la première fois au Printemps des Comédiens 2023 à Montpellier.
Il sera en tournée dès 2024 avec de nombreuses dates dont une à Châteauvallon-Liberté, scène nationale et une à l’Assemblée nationale. En 2023, il joue également aux côtés d’Emmanuelle Bercot dans la nouvelle création d’Ivo van Hove Après la répétition /Persona, créée au Printemps des Comédiens. En mai 2024 il présentera Montessori, mise en scène adaptée et interprétée par Bérengère Warluzel et en mars 2025, sa nouvelle création Lost and Found / C’est si simple l’amour d’après l’oeuvre de Lars Norén à Châteauvallon-Liberté, scène nationale.
Comédien de théâtre depuis le début des années 1980, Alain Fromager a incarné de nombreux rôles dans des pièces de Racine, Koltès, Choderlos de Laclos, Anouilh ou Ibsen. Au théâtre, il a collaboré régulièrement avec Jean-Louis Martinelli notamment dans Britannicus de Jean Racine (2013), Maison de poupée d’Henrik Ibsen (2012), Platonov d’Anton Tchekhov (2001), Andromaque de Jean Racine (2000), Catégorie 3.1 (1999) de Lars Norén, Dans la fumée des joints de ma mère de Christiane Citti (2021). On le retrouve également au théâtre dans des distributions de spectacles mis en scène par Macha Makeïeff, Ivo van Hove, Jacques Vincey, Charles Berling, Alain Beigel, Michel Didym ou Jacques Nichet. En 2017, dans la pièce Art, de Yasmina Reza, il donne la réplique à Charles Berling et Jean-Pierre Darroussin au théâtre Antoine et en tournée dans toute la France. À la télévision, on a pu le voir dans de nombreuses séries à succès telles que Nos enfants chéris, Les bleus, premiers pas dans la police, Louis Page ou encore Capitaine Marleau. Les années 2000 lui ont offert de grands rôles au cinéma notamment dans Qui m’aime me suive, Pars vite et reviens tard ou Mesrine : l’instinct de mort, et plus récemment dans Le Consentement (2023).
Après des études au conservatoire de Montpellier puis au CNSAD de Paris, actrice de théâtre ayant joué des pièces du répertoire et contemporaines avec notamment Jean-Pierre Vincent Stuart Seide, Philippe Adrien, Jean-Louis Martinelli, Alain François, Dominique Pitoiset, et récemment avec Ivo Van Hove dans Vu du Pont d’Arthur Miller et dans L’Eden cinéma de Marguerite Duras mise en scène par Christine Letailleur.
Caroline Proust se fait connaître du grand public en incarnant en 2005 Laure Berthaud dans Engrenages, première série originale de canal+.
Cette série est diffusée internationalement et se prolonge pendant 15 ans, couronnée d’un Emmy Awards en 2015 récompensant la meilleure série. Elle tourne dans de nombreux films pour la télévision et le cinéma. Caroline est aussi autrice réalisatrice et productrice depuis 2017 de films courts dans lesquels sont apparus Charles Berling et Alain Fromager ainsi que d’un documentaire Engrenages dans la peau diffusé sur Canal+.
On a pu la voir en 2022 à l’affiche de Notre Dame, La Part du feu aux côtés de Roschdy Zem et Simon Abkarian écrit et réalisé par Hervé Hadmar pour Netflix en 2022 et au cinéma dans Marinette biopic de la joueuse de football internationale Marinette Pichon réalisé par Virginie Verrier sortie en juin 2023.
Formée et diplômée du conservatoire d’art dramatique de Toulon, Bérengère Warluzel intègre ensuite l’ERACM. Elle travaille régulièrement au Théâtre National de Nice sous la direction de Daniel Benoin, au Théâtre National de Gennevilliers, à La Criée, Théâtre national de Marseille.
Au fil de sa carrière elle entretient un rapport particulier à la musique. Elle se produit en tournée dans toute la France dans le rôle de George Sand dans un spectacle musical, et interprète régulièrement des rôles dans des opérettes telle que La Veuve Joyeuse, ou comme récitante dans L’Histoire du soldat. Elle travaille également pendant 5 ans comme assistante metteur en scène et régisseur à l’Opéra National de Paris. Elle met en scène un spectacle musical à l’opéra Royal de Versailles autour de la reine Marie-Antoinette. Elle est également assistante du chef d’orchestre Daniel Oren, sur ses productions en Europe, en Asie et en Amérique. En 2020 elle crée un montage de textes d’Hannah Arendt Fragments dont la première s’est tenue en juillet 2021 à Avignon. La pièce affiche une cinquantaine de représentations et poursuit sa tournée. En 2023, elle participe à l’adaptation théâtrale du podcast à succès de France Inter : Léon Blum, une vie héroïque, écrit et réalisé par Philippe Collin, Violaine Ballet et Charles Berling. Cet évènement théâtral participatif a été présenté pour la première fois au Printemps des Comédiens 2023 à Montpellier. Il est en tournée dès 2024 avec de nombreuses dates dont une à Châteauvallon-Liberté, scène nationale et une à l’Assemblée nationale. Elle présente sa nouvelle création Montessori d’après l’œuvre de Maria Montessori et mis en scène par Charles Berling. La première a eue lieu au Liberté, scène nationale le 14 mai 2024.
En mars 2025, elle jouera dans Lost and Found & C’est si simple l’amour d’après l’œuvre de Lars Norén et mis en scène par Charles Berling.