Pour Jacques Rebotier, le langage est un océan, les phrases y sont des vagues, sans cesse recommencées. Au plateau, il réunit trois comédiennes qui sont aussi des musiciennes : Émilie Launay Bobillot, Aurélia Labayle et Anne Gouraud.

Un personnage à trois têtes, trois langues et six pieds nous restitue le naturel et la fluidité de la voix quotidienne, dans la complexité de ses intonations, articulations, variations de débit, accents et rythmes. On se laisse porter de rues en paysages mentaux, politiques, amoureux, sportifs, champs de batailles, internet. C’est à la fois drôle et méditatif, toujours surprenant.

Texte, mise en scène et musique Jacques Rebotier
Interprétation Émilie Launay Bobillot, Aurélia Labayle et Anne Gouraud
Interprétation Émilie Bobillot, Aurélia Labayle, Anne Gouraud
Lumières (en cours)
Son Bernard Valléry
Costumes (en cours)
Régie générale (en cours)

Production voQue
Convention DRAC – Île-de-France
Coproductions Châteauvallon-Liberté, scène nationale / La Colline, Théâtre Nationale 
Soutiens Joël Jouanneau, L’Éphémère et la ville de Port-Louis

Photos © Rebotier – Poèmes-fotos
Texte © Vanessa Asse

L’océan respire ses vagues. La langue générale vit par nous, le dos de nos langues, elle nous sur-vit et nous, nous vivons à travers elle. Sur le plateau du monde, des millions de petites langues s’agitent en tous sens, qui font l’immense langue vivante. 

« Je cherche quelque chose d’à la fois très quotidien et très abstrait, parlé par tous d’une même voix et qui donne à entendre ce qu’on pourrait appeler le grondement, la rumeur, de notre langue. Sous la forme d’une sorte de chœur à l’antique, mais contemporain. Le parlé est de nature « rythmique », c’est-à-dire, ruein, qu’il coule. Comme un ruisseau ou un, disons, ru. L’objectif est de restituer le naturel et la fluidité de la voix parlée, dans la complexité de ses intonations, de ses articulations, variations de débit, accents, rythme. Dès qu’il s’agit de parler à l’unisson, la nécessité d’une mise en place induit souvent un caractère scandé, empesé, mécanique même, et en tout cas artificiel, qui tue net la parole. Faire mourir la langue vivante,  je voulais absolument éviter cela. Il s’agit pour moi de donner à entendre la souplesse de la langue lorsqu’elle est parlée en solo, mais rendue soudain étrangère par le simple fait de parler d’une même voix à plusieurs. Le contenu et la matière même du discours, personnel, subjectif, devient tout-à-coup objet, comme donné à voir, et c’est cet écart entre l’intime et l’objectif, le vivant et l’abstrait, qui déplace le regard. »

Il y a chez Rebotier une énergie paradoxale qui dérange et réjouit. Il joue avec les syllabes et les notes, les échos et les sons, la mise en sens et en non-sens des grands thèmes qui agitent la vie : l’amour, le désamour, le peu de vie. Ses poèmes sont à entendre comme des pièges qui inventeraient de nouvelles proies, et une nouvelle écoute, et une nouvelle déroute. France Culture

Jacques Rebotier est un jongleur de mots, un orchestrateur de spectacle, un organisateur de chaos, un multiplicateur de points de vue, un anthropologue encyclopédiste vélocipédiste qui a tenté le tour de l’Omme et n’en revient toujours pas. (…) c’est aussi un citoyen inquiet, il s’interroge en mots et en musique et non sans humour sur l’état de notre planète et sur les mauvais tours que l’humain se joue à lui-même. Les Inrocks

Nous avons un Queneau écolo bien vivant, bien mordant, bien tranchant, et nous ne le savons pas assez ! Le Canard enchaîné

→ Différents podcasts sur Jacques Rebotier à écouter sur France inter

Jacques Rebotier met en scène ses propres textes, dans des spectacles dérangeants et joyeux, qui allient une écriture exigeante à un esprit insolite, ou plutôt d’ « incongru », ce qui refuse de se mélanger. Il a été associé entre autres au Théâtre de l’Athénée, au Théâtre National de Strasbourg, au Quartz à Brest et au Théâtre Nanterre-Amandiers.

Il a créé ses spectacles à Avignon, à la Comédie-Française, au Théâtre national de Chaillot et au Théâtre Gérard- Philippe de Saint-Denis, notamment autour de son Description de l’omme, encyclopédie (éditions Verticales). Mais il se met parfois au service d’autres textes qui le nourrissent particulièrement, comme Qui est là ? de Jean Tardieu (Centre Pompidou), Éloge de l’ombre de Tanizaki (Amandiers de Nanterre), Ode à la ligne 29 de Jacques Roubaud (Bouffes du nord), Le jeu de la feuillée d’Adam de la Halle (Comédie-française). Il fonde en 1992 la compagnie voQue : ensemble de musique et compagnie verbale à l’origine de nombreuses créations à La Comédie Française, au Théâtre National de Chaillot, au Théâtre Nanterre-Amandiers, au Théâtre National de Strasbourg, dans les Opéras de Paris, Lyon, Montpellier, Lille et dans de nombreux pays.

Jacques Rebotier est l’auteur d’une quinzaine de livres édités chez Gallimard, Verticales, Harpo &, Actes sud, La Ville brûle ou Æncrages & Co. Son théâtre est édité aux Solitaires intempestifs. Performeur, il est régulièrement invité à dire ses textes seul ou accompagné de complices, paysagistes, musiciens, chanteurs, comédiens comme Gilles Clément, Élise Caron, Edward Perraud, Vimala Pons, Olivia Rosenthal, Anne Le Pape, Maxime Morel, Yves Pagès, Joël Jouanneau…

Il écrit une musique libre, expressive, souvent liée au texte, ou virant au théâtre instrumental. Jeux de langage, formes, glissements du son et du sens, le travail de Rebotier porte avec précision sur tous les aspects du phrasé et de l’articulation, intonation, accentuation, rythme, débit. Du Requiem à l’orchestre symphonique, de ses 2 x 66 brèves pour musiciens-parlants à son théâtre musical de chambre, il a créé ses œuvres avec l’Ensemble 2E2M, l’Ensemble Intercontemporain, l’Ensemble Court-Circuit, Ars Nova, Accroche notes, Aleph, l’Orchestre National de Jazz, Les Cris de Paris, l’Ensemble Sillages, l’Orchestre Philharmonique de Radio France, l’Orchestre National d’Île-de-France, les Opéras de Paris, Lille, Montpellier, et sa compagnie voQue.